C’est un mot à la mode cette année : procrastiner, procrastination. Mais quelle est la définition de procrastiner ? C’est l’objet de cet article.
Origine du mot procrastiner
Procrastiner vient du latin « procrastinare » qui signifie :
- pro : en faveur de
- crastinus : lendemain
Littéralement, on est favorable au lendemain.
Si on applique cela à une tâche, une action à réaliser, on la reporte au lendemain, on ajourne la tâche. En fait on remet la tâche au lendemain.
Cela fait penser au proverbe :
Il ne faut jamais remettre au lendemain ce que tu peux faire le jour même.
Maxime antique
C’est typiquement le proverbe que déteste tout bon procrastinateur.
Un procratinateur est la personne qui a tendance à remettre les tâches au lendemain au lieu de les faire le jour même.
Maintenant que l’on connaît la définition de procrastiner, est-ce une bonne chose ou non ?
Contre procrastiner ?
C’est un peu la tendance actuelle : ne pas procrastiner, être productif, efficace, aller toujours plus vite, la tendance de notre société : toujours plus vite, toujours plus : des réseaux mobiles plus performants, des achats sur internet livrés toujours plus vites.
La patience, le fait de ralentir semble être un contre-courant de la société mais pas une vertu. Pourtant certains le prônent : la slow life.
Pour appuyer mes dires que c’est la tendance actuelle de ne pas procrastiner, il suffit de faire une recherche sur Google pour en avoir la confirmation. Je tape juste en mot clé de recherche : « procrastiner ».
Les premiers résultats sont :
- définition de procrastiner
- Procrastination : comment arrêter de tout remettre à plus tard ?
- Arrêter de Procrastiner : 10 trucs surprenants pour stopper vos envies effrénées de procrastiner
- 5 conseils contre la procrastination… à lire maintenant, pas demain !
- Les 5 causes qui nous amènent (presque toujours) à procrastiner
- Comment Arrêter de Procrastiner? Une matrice + 3 Stratégies non-conventionnelles
Cela confirme que nous cherchons pour une majorité d’entre nous à ne pas procrastiner.
Je ne vais pas refaire un article supplémentaire sur le sujet, en vous donnant les 10 meilleurs conseils pour éviter de procrastiner, la méthode pour vaincre la procrastination.
Ce n’est pas mon domaine d’expertise.
Si vous souhaitez en savoir plus, je vous conseille l’excellent article de Julien sur le sujet :
Ce qui me semble intéressant, c’est de vous proposer une autre vision, une vision alternative : est-ce qu’il y a des bénéfices à savoir procrastiner ?
Pour procrastiner ?
Cela semble être à contre courant de tout ce que l’on peut lire.
Mais peut-on tirer des bénéfices à cela ?
La première histoire qui me vient, c’est celle qui nous est à tous arriver un jour.
Un mail qui arrive urgent avec une action à faire. Vous oubliez, consciemment ou non de traiter le sujet.
Quelques jours passent, vous êtes entrain de trier votre boîte mail et vous retombez sur ce mail pour lequel vous n’avez rien fait du coup.
Vous contactez la personne en demandant si la demande est toujours d’actualité, et là bonne nouvelle : ce n’est plus d’actualité, il a réussi à trouver la solution d’une autre manière.
Ne serait-ce pas un bénéfice d’avoir procrastiner ?
Le fait de ne pas répondre dans l’instant et le fait d’avoir remis au lendemain ou surlendemain la réponse à ce mail, fait que le demandeur a trouvé par lui-même une autre solution pour répondre à sa demande.
La procrastination : un atout pour votre créativité et votre innovation
Dans une étude menée à l’Université du Wisconsin par la professeure Jihae Shin, il a été demandé aux participants de générer de nouvelles idées business.
Les participants ont été divisé en deux groupes :
- Le premier groupe a commencé tout de suite à travailler sur générer des nouvelles idées de business, juste après l’explication de ce qu’il devait faire
- Le deuxième groupe a commencé par un temps de 5 minutes pour faire des jeux de sociétés.
A la fin du temps imparti, les deux groupes ont soumis leurs idées à un jury indépendant qui ont noté les idées les plus originales.
Les idées du deuxième groupe, le groupe qui a pris le temps, qui a procrastiné étaient 28 % plus créatives que les idées du premier groupe qui n’a pas procrastiné.
Quelle explication peut venir appuyer ces faits ?
La procrastination permet, favorise une pensée divergente, qui sort de l’ordinaire.
Le fait de remettre à plus tard ce que vous devez faire vous laisse du temps pour cogiter sur le problème et trouver toutes les idées possibles. Elles sont en générales plus originales, plus audacieuses que si vous vous penchez tout de suite à essayer de trouver une solution. C’est un peu le sens du proverbe :
La nuit porte conseille.
Anonyme
Le fait de laisser passer la nuit, permet que la situation se décante et d’y voir plus claire le lendemain matin, voir trouver une solution à laquelle on n’a pas pensé sur l’instant.
Mais attention, la question du timing est importante.
Des scientifiques et ingénieurs de la NASA ont mis en exergue le fait que durant un certain laps de temps, la performance augmente à mesure que les délais se raccourcissent.
L’anxiété générée par la procrastination est suffisamment faible pour être gérée correctement, mais suffisamment élevée pour créer ce boost permettant de favoriser la créativité et la performance.
Par contre, dès lors que ces délais deviennent trop justes, la performance décline car le stress devient trop important pour avoir un impact positif et nous rendre réellement productifs.
Pour que la procrastination soit bénéfique, le conseil est de lire toutes les infos possibles en amont avec l’objectif à réaliser en tête. Puis, laissez passer les jours car même si vous ne travaillez pas activement sur le projet, les informations tournent dans votre tête et des idées se créent.
L’apport des neurosciences pour comprendre
Quelles différences cérébrales existent entre les gens qui procrastinent et ceux qui arrivent à accomplir les tâches désagréables immédiatement ?
Quatre points ressortent :
- Certaines régions des personnes qui procrastinent sont plus actives que la moyenne. Par exmple, le gyrus parahippocampal et le cortex préfrontal ventromédian. Dès qu’une tâche désagréable doit être effectuée, ces régions commencent à s’activer et nous font divaguer.
- De plus, le cortex préfrontal dorsolatéral, qui se charge de diminuer l’activité de ces deux régions pour sortir du vagabondage mental, afin de rester concentré, est moins actif. A l’inverse, chez les personnes qui ne procrastinent pas, l’activité du cortex préfrontal dorsolatéral est importante et vient bloquer l’activité des deux régions.
- Il faut aussi noter que lorsque le cerveau se met à vagabonder, il devient sensible aux influences de l’amygdale. L’amygdale nous aide, entre autres, à attribuer une valeur négative aux choses qui nous entourent. Lors d’une étude sur 264 sujets, ceux étant procrastinateurs avaient une amygdale beaucoup plus active que les autres et étaient donc plus enclin à ressentir des émotions négatives face à une action qu’ils ne veulent pas faire.
- Et pour finir, les personnes qui procrastinent ont une connexion moins solide entre l’amygdale et le cortex cingulaire antérieur dorsal. Cette connexion contribue au choix de faire ou de ne pas faire une action.. Plus cette connexion est faible, moins un individu pourra totalement contrôler ses actions, et sera donc plus sensible aux réactions spontanées. Et comme la réaction spontanée de l’humain est de minimiser son désagrément et inconfort, le procrastinateur est enfermé dans l’instant présent, dans la recherche de plaisir immédiat et va donc repousser la tâche désagréable à plus tard.
Il reste à savoir comment améliorer cette connexion entre l’amygdale et le cortex cingulaire antérieur dorsal. Je n’ai pas encore approfondi le sujet, mais c’est dans ma liste des sujets à traiter dans les prochains mois.
Si vous voulez approfondir ce regard alternatif sur la procrastination, je vous conseille de lire le livre « La procrastination » de John Perry.